
Chiara Marieni
En charge des études commerciales chez Carbfix, Chiara Marieni a déjà derrière elle une riche trajectoire professionnelle : marquée par la recherche, l’ouverture internationale et l’envie d’aller vers un monde que l’on décarbone.
C’est à la maîtrise technique du stockage de CO2, notamment via le principe de minéralisation, que Chiara s’intéresse depuis ses études universitaires. Après une thèse et des postdoctorats dans ce domaine, elle poursuit son chemin hors des sentiers de la recherche académique et a choisi d’intégrer l’entreprise islandaise Carbfix.
Comment passer de la recherche académique à un emploi dans une compagnie industrielle ? Trouver un équilibre personnel dans un travail qui reste au plus proche de ses centres d’intérêt et de sa curiosité ? C’est la trajectoire dont Chiara Marieni nous parle aujourd’hui.
De la recherche académique au monde industriel – un rapprochement qui fait sens
Après un doctorat sur les méthodes de stockage du CO2 en Grande-Bretagne (université de Southampton), une expérience de recherche en Islande, elle arrive à Toulouse au GET (Géosciences Environnement Toulouse), y prend ses marques et réalise 2 postdoctorats.
Lors du dernier post-doc, Chiara travaille sur le projet C-Store (ressourcé par le Carnot ISIFoR en 2020) et porté par mme Benezeth (DR CNRS, GET). L’idée était d’étudier le stockage minéral du carbone à basse température dans les roches mafiques et ultramafiques, une étude en lien avec un site pilote en Islande nommé Carbfix (qui a ensuite donné le jour à la société qui existe actuellement).
Forte de ces connaissances et Carbfix étant devenue une entreprise décidée à développer la technique de minéralisation, Chiara rejoint la compagnie islandaise en 2022.
Ce passage ne s’est cependant pas réalisé du jour au lendemain. « J’étais très contente des travaux de recherche que je pouvais mener en doctorat comme en post-doctorat. Or c’est le côté projets de recherche européens , alliant recherche et gestion/coordination de projet, qui m’a fait découvrir ce métier à double dimension que j’apprécie tant. Et c’est au quotidien que je voulais m’y exposer et ainsi exploiter tous mes savoirs et savoir-faire. » Cette prise de conscience a été le déclencheur du changement. « Les contacts noués lors de ces travaux autour du CO2 avec Carbfix et notre connaissance réciproque m’a conduit à intégrer la compagnie sereinement, à distance, depuis la France. »
« C’était un vrai pari. L’entreprise ne comptait que 15 personnes en 2022, à présent nous sommes 60. Je savais que les premières années pouvaient s’avérer intenses, et en effet on est toujours à fond. »
Carbfix : minéraliser le CO2 – du projet islandais au déploiement international
Comme nous l’avons vu le projet Carbfix a débuté en Islande car il y a là un terrain particulièrement propice. Y sont rassemblés : beaucoup d’eau, des roches se prêtant bien à cette minéralisation et une énergie peu chère et abondante.
Sur la base de ce trio vertueux, un projet scientifique s’est constitué en 2007 porté par le CNRS de Toulouse (France), la Columbia University (EUA), Reykjavik Energy (compagnie d’électricité islandaise) et l’Université d’Islande.

Carotte présentant du CO2 minéralisé
La technologie Carbfix se propose de dissoudre le CO2 capturé dans l’eau, puis l’injecter dans des roches poreuses magmatiques du sous-sol (du basalte par exemple). Le carbone piégé réagit avec des éléments dont ces roches sont riches (fer, calcium…) et se minéralise en quelques années.
Ce travail de recherche ambitieux a duré des années, porté des fruits et démontré son efficacité. Ainsi en 2020 une société islandaise, nommée Carbfix, voyait le jour pour proposer ses services sur ce type de stockage, en s’appuyant sur cette technologie. La méthode ayant prouvé son efficacité en Islande elle pouvait être proposée sur les lieux les plus émetteurs de CO2 dans beaucoup d’endroits du monde. C’est sur ces possibles développements que Chiara travaille actuellement. Pour résumer, il s’agit de répondre au besoin de décarbonation des industries émettrices de CO2, en leur proposant une solution de neutralisation de leurs émissions, via la solution de minéralisation qui soit la plus proche géographiquement.
Une scientifique pour développer l’offre commerciale de Carbfix
Le rôle endossé par Chiara Marieni c’est de développer la partie initiale des projets à l’international. Il faut, en effet, déterminer s’il y a du potentiel souterrain dans telle ou telle zone, dans tel bassin industriel… pour cela elle coordonne l’équipe de Carbfix qui réalise les études et elle fait le lien avec les clients. Cela permet d’avancer sur les projets et voir s’ils peuvent se développer.
« Je m’intéresse aux sites industriels et en fonction de leur situation géographique je détermine avec les équipes Carbfix s’il y a un potentiel géologique. S’il y en a un et que des clients sont partants, l’idée c’est d’avancer sur un certain nombre d’études, par étapes, jusqu’à l’injection via un pilote pour vérifier que tout fonctionne bel et bien pour le site considéré. »
« L’Islande a une situation idéale pour la minéralisation du CO2 c’est vrai. Mais des roches il y en a partout dans le monde. La question c’est de prendre en compte tous les paramètres, et au final il y a souvent moyen de faire du stockage souterrain dans de bonnes conditions ».
Des projets pour l’avenir, même en France ?
« Mon rôle est de développer notre proposition dans les zones où la production de CO2 est importante, cela peut être aux États-Unis, en Asie et bien sûr en Europe. Mais nous sommes dépendants de facteurs externes : le sous-sol, le cadre juridique propre à chaque pays et les financements. Ce sont ces éléments qu’il faut rassembler pour que les projets tiennent debout. »
Aujourd’hui des projets sont à l’étude en Europe. La France pourrait bien être adaptée à la technologie Carbfix compte tenu de son sous-sol et ceci par exemple dans le Massif Central.
Ces projets verront-ils le jour ? l’avenir nous le dira.