Une des vertus des instituts Carnot est de favoriser l’interconnaissance entre les scientifiques. Ces rencontres, entre des chercheurs qui parfois ne se connaissent pas, peuvent être à l’origine de projets qui mettent en présence des disciplines ou des dispositifs qui ne se seraient pas rencontrés autrement.
Une telle situation est parfaitement illustrée par les travaux conjoints de Guillaume Galliéro du Laboratoire des Fluides Complexes et leurs Réservoirs (LFCR) et Dominique Legendre de l’Institut de Mécanique des Fluides de Toulouse (IMFT). Leur appartenance commune au Carnot ISIFoR a permis de créer un terrain fertile pour de nouvelles recherches qui s’appuient sur des échelles de recherche très éloignées : le moléculaire et le milieu continu.
Une collaboration qui prend racine dans un projet soutenu par ISIFoR
La collaboration entre les deux chercheurs remonte à 2013, avec le soutien du Carnot au projet « Wetdyn » (Mouillage dynamique, du micro- au macroscopique). « Avant cela, nous ne nous connaissions pas, Dominique (Legendre) m’a contacté car il connaissait mes travaux et il voulait un complément de regard sur un travail qu’il avait à l’esprit. », explique Guillaume Galliéro. Ce premier projet a permis de poser les bases d’un échange scientifique constructif entre les deux laboratoires et d’exploiter des approches complémentaires : alors que le LFCR s’intéresse aux échelles microscopiques allant jusqu’au nanomètre, l’IMFT est davantage orienté vers des études à une échelle plus macroscopique, typiquement la dynamique de gouttes millimétriques. Sur ce croisement d’expertises et de regards s’est construit un travail relatif à la dynamique du mouillage de liquides sur différentes surfaces et dans des contextes variés. Une voie qu’ils poursuivent encore aujourd’hui.
Des questions autour des travaux de Pierre-Gilles de Gennes
Inspirée par les travaux pionniers de Pierre-Gilles de Gennes et son équipe, leur recherche actuelle se concentre sur le comportement des fluides à différentes échelles et en particulier la manière dont un liquide se déplace sur un substrat en fonction des changements de température, parfois nommé thermocapillarité ou thermoosmose. Ce mécanisme, applicable au transport de fluides dans le sous-sol, vise à fournir une modélisation précise des déplacements de liquide dans certaines conditions de gradients thermiques – un enjeu crucial pour des secteurs comme l’énergie ou l’environnement.
Le projet actuel, initié en 2023 et nommé Thermosm, est donc le prolongement des travaux commencées il y a dix ans. Ici, l’objectif est de confirmer des principes théoriques établis, tout en cherchant à pousser l’analyse jusqu’aux effets thermiques appliqués aux interfaces liquide-solide à l’échelle microscopique.
Les enseignements récents de ces travaux
Avec l’aide du Carnot ISIFoR, cette collaboration en plusieurs temps a permis de recruter des post-doctorants successifs dont les travaux ont été publiés. Le dernier post-doc, Petter Johansson, a validé certains aspects théoriques du modèle de Pierre-Gilles de Gennes, en prouvant la pertinence de sa modélisation des mouvements de fluides le long d’un gradient de température. Au-delà de la confirmation théorique, ils apportent aussi des perspectives nouvelles, en élargissant la compréhension de l’effet des gradients thermiques sur les fluides, depuis l’échelle moléculaire jusqu’à des applications macroscopiques.
Après 10 ans de collaboration
Avec plus d’une décennie de collaborations scientifiques, les deux chercheurs envisagent la suite de ces travaux et ont toujours envie de travailler ensemble sur un domaine qui est « dynamique ». Ce qui leur parait aujourd’hui pertinent ce serait de poursuivre leurs travaux communs via une ANR avec une approche similaire couplant échelles microscopique et macroscopique qui s’avère une voie fructueuse et prometteuse.
Cette collaboration illustre combien les synergies permises par des financements du Carnot ISIFoR ont pu accompagner la maturation de la recherche et ouvrir la voie de futurs développements.