Les prémices d’un projet de recherche peuvent apparaître mystérieuses, presque teintées de magie : le chercheur aurait subitement une inspiration l’amenant à explorer de potentielles nouvelles limites de son domaine d’étude. Les choses sont généralement bien plus simples et c’est ce que nous allons constater aujourd’hui.
Les projets de recherche se déroulent sur un temps généralement long (entre quelques mois et plusieurs années), ils trouvent souvent leur origine dans un monde de congrès et d’articles scientifiques. Lors de ces évènements, les chercheurs peuvent entamer, ou poursuivre, des discussions avec des collègues scientifiques d’autres universités ou d’entreprises. C’est bien souvent à la suite de ces échanges que démarrent les projets de recherche.
Nous allons dans les lignes qui suivent décrypter les premières étapes du montage d’un projet de recherche avec un partenaire industriel. Rédigé à la suite d’un entretien avec Virginie Caturla*, ce texte aborde les situations les plus habituelles du montage de projet et donne quelques clefs pour avancer au mieux lors de ces étapes.
La prise de contact
Le chercheur ayant rencontré la personne et l’entreprise avec qui il a envie de collaborer, ils peuvent envisager d’apprendre à mieux se connaître en organisant une visite du laboratoire de recherche. Cela permettra de commencer à réfléchir au futur projet de recherche.
C’est cependant un moment délicat car beaucoup d’éléments viennent se bousculer lors de cette première étape. Peuvent se mêler l’enthousiasme à l’idée de commencer de nouveaux travaux, l’envie de travailler avec un interlocuteur qu’il ne connait peut-être pas encore, un travail aux formes scientifiques inédites, des perspectives de découvertes, la possibilité de former un étudiant (stagiaire ou futur doctorant)…
L’envie est donc grande de commencer au plus vite, mais il faut déterminer dès ce moment ce qui peut être de l’ordre du confidentiel pour les chercheurs et leurs structures d’appartenance.
Pour enclencher et sécuriser les premiers échanges entre chercheurs, il est judicieux de mettre en place un accord de confidentialité qui protègera les uns et les autres et garantira de bonnes fondations pour édifier le travail de recherche. L’accord de confidentialité permet aux chercheurs de se parler et donner des détails de leurs travaux antérieurs ou actuels, cela permet de voir si la mise en commun de leurs compétences acquises permettrait d’avancer plus vite. Seuls les travaux antérieurs sont libres de diffusion par le chercheur les détenant. Nous avons ensuite, dans le cadre de l’accord de collaboration qui est mis en place, un article de confidentialité pour continuer les échanges et maintenir les résultats secrets. Et c’est dans cet accord de collaboration qu’on définira entre les structures signataires les conditions de publications et de divulgation des résultats obtenus.
Des engagements financiers, en ressources humaines ou en résultats escomptés peuvent s’avérer intenables si tous les éléments n’ont pas été bien pesés en amont. Pour éviter une importante perte de temps et des malentendus ultérieurs, il faut ainsi définir précisément les formes du travail à venir.
L’instruction
Que le scientifique soit directement en relation avec une entreprise ou que cette dernière ait pris contact via le laboratoire, le moment du travail sur le montage du projet reste le même, il s’agit de l’instruction qui est menée par le chercheur avec son service juridique/contractuel dédié.
C’est généralement le moment où il faut consolider les aspects financiers. Comme lors du partage de données sensibles, il faut être vigilant. À un tel moment, on doit avoir une idée de ce que coutera la réalisation du projet commun : temps du chercheur pour mener à bien le projet, embauche de personnels non permanents comme les post-doc, doctorants, stagiaires, l’encadrement de thèses CIFRE, achat de matériels spécifiques, utilisation de tel ou tel équipements de mesure, les frais de missions… Ces postes sont bien connus des services juridiques/contractuels. En ayant une connaissance fine du projet scientifique que les chercheurs des deux parties veulent mener ensemble, ce service détermine très rapidement s’il s’agit d’une prestation de recherche ou d’un contrat de collaboration. Puis on avance sur l’évaluation des coûts et sur les contours du contrat à venir.
Bien dessiner le périmètre du projet permettra de rédiger le contrat, sans à-coups, dans une confiance mutuelle propice à son bon développement.
Le soubassement du projet de recherche est alors solide (prix, durée, projet scientifique, étapes et forme que prendra le travail sont arrêtés) et c’est une autre étape qui commence… dont nous vous parlerons dans un prochain article.
* Directrice opérationnelle du Carnot ISIFoR